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ASSOCIATION FÉCAMP TERRE-NEUVE
LA PÊCHE AU HARENG


1/ Le « hareng-roi »

Le hareng : nom scientifique Clupea harengus, famille des Clupéidés.
Selon les espèces, le hareng mesure de 20 à 30 cm. Sa couleur est gris argenté. Il se pêche de juin à octobre au Nord-Est de l’Ecosse, puis au Sud-Est de l’Angleterre : c’est la « pêche d’été » ; et de novembre à janvier en Manche : c’est la « pêche d’automne ».

Lacépède, naturaliste français, écrivait à la fin du 18ème siècle : « le hareng est une des productions dont l’emploi décide de la destinée des empires… »
Facile à conserver et à sécher, le hareng fut une des premières ressources des mers exploitées par les peuples du Nord. En France, c’est l’installation des Vikings qui a considérablement développé la pêche et la salaison du hareng dans les ports du Nord du pays.

Au Moyen Âge, le hareng, très abondant, constitue une nourriture bon marché pour les populations les plus pauvres. Aliment essentiel pendant les nombreux jours de carême et d’abstinence (plus de 150 par an !), il représente une véritable monnaie d’échange dans les ports de pêche. Ainsi, à Fécamp, l’Abbaye de la Sainte-Trinité, à qui est concédé le port depuis 1185, développe la pêche du hareng et en tire une notable partie de ses revenus.

Après les guerres de Révolution et de l’Empire, le port de Fécamp révèle sa supériorité pour la pêche du hareng en armant jusqu’à 50 grands bateaux et 163 petits bateaux montés par 1 500 hommes ! Ainsi, du 19ème au milieu du 20ème siècle, Fécamp resta le meilleur représentant de la pêche harenguière, classée parmi les grandes pêches maritimes.

2/ la technique du filet dérivant

Quels que soient les navires utilisés, les Fécampois pêchaient traditionnellement le hareng au moyen de filets dérivants. Cette technique se pratique à l’aide d’une suite de filets appelés « sennes ». Assemblées les unes aux autres, celles-ci sont maintenues verticalement dans l’eau, afin que le poisson s’y prenne par les ouïes. Cet ensemble de filets, nommé « tessure », peut mesurer jusqu’à 6 kilomètres. La mise à l’eau s’effectue avant la tombée de la nuit. Les sennes et les quarts-à-poche sont amarrés au halin, puis mis à l’eau debout au vent et on hisse le tape cul sur le mat arrière. Quand la tessure est « dehors », le navire est maintenu à la dérive pendant la pêche. On abaisse alors le grand-mât pour diminuer la prise au vent.

Le virage ou remontée de la tessure a lieu généralement au point du jour sur les voiliers, et vers deux heures du matin sur les drifters. Le halin est viré au cabestan et « lové » dans sa cale. Au fur et à mesure de leur remontée, les quarts-à-poche sont libérés et rangés à l’avant du pont.

Les matelots hissent manuellement le filet à bord, par le travers du navire, le tirent sur deux rouleaux en bois, et le secouent pour « débroquer » ou décrocher le hareng qui tombe dans les parcs à poissons appelés « gattes » et sur le pont. Cette opération demande au moins six heures de travail difficile aux pêcheurs, qui doivent tirer toute la longueur de la tessure, alourdie par le poids du poisson. Aussitôt pêché, le hareng est salé et mis dans des barils en bois. À terre, il subira sa préparation définitive de conservation.

3/ les navires harenguiers

Depuis le début du 19ème siècle et jusqu’en 1957, on utilisa successivement trois types de navires. Ils sont tous équipés d’une « miche » : support du grand-mât que l’on abaisse pendant la pêche et de rouleaux sur lesquels sont tirées et secouées les sennes. Apparue au 18ème siècle, les lougres, qui étaient à l’origine des navires de guerre, sont grées pour la pêche du hareng vers 1820. Ce sont des petits voiliers à trois mâts, munis, pour remonter le halin, d’un cabestan à bras, amélioré vers 1870 par le cabestan à vapeur.

Les lougres sont remplacés par les dundees, nom originaire du port de Dundee en Écosse, ou « dandys ». Voiliers à deux mâts, d’une longueur variant de 30 à 35 mètres, ils comportent un équipage de 22 à 25 hommes et sont généralement de bons marcheurs, solides et stables.
…« les dundees partaient pour la pêche fin juin et montaient vers le Nord… C’était un beau spectacle de voir ces bateaux, toutes voiles dehors, apparaître au large d’Yport, l’un derrière l’autre, à distance respectable, embouquer les jetées à toute allure… » (Léonce Bennay)

Au début du 20ème siècle, les drifters succèdent petit à petit aux dundees, qui disparaissent totalement vers 1929. Ce sont des bateaux en acier, dont l’équipage est composé de 32 hommes. D’une longueur de 35 à 40 mètres, ils sont propulsés par une machine à vapeur au charbon. Le dernier drifter fécampois, « l’Emmanuela », est désarmé en 1957. Avec lui, cesse la tradition de la pêche au filet dérivant qui, hormis sur les caïques d’Yport et d’Étretat, est remplacée par le chalutage.


Marie-Hélène Desjardins
Conservateur du musée des Terre-Neuvas & de la pêche.
© Musée des Terre-Neuvas de Fécamp.

La reproduction d’extraits de ce texte est autorisée sous réserve d’en mentionner l’auteur et l’éditeur.

Pour en savoir plus : Philbert Bourdon, Les hommes de Balmasc, 2002