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NAVIRES

LA GRANDE PÊCHE

ASSOCIATION FÉCAMP TERRE-NEUVE
Mh. Desjardins / © Édition Association Fécamp Terre-Neuve
La reproduction d’extraits de ce texte est autorisée sous réserve d’en mentionner l’auteur et l’éditeur.
Eugène Grandin (1833-1916)
Ouragan du 7 décembre 1891, 1891
Huile sur toile, 567 x 810 mm
Signé en bas à droite : Havre 1891 / Eugène Grandin (+ ancre)
Inscription en bas à gauche : Henri Rivière de Fécamp, patron Jules Lefebvre, armateur Louis Coquais - Ouragan du 7 décembre 1891.
Musée de Fécamp,  inventaire FEC.208
Le Henri Rivière, est un dundee harenguier immatriculé F1156, construit au chantier Capon de  Fécamp en 1884, appartenant à l'armateur Louis Coquais.
Le Journal de Fécamp du 7 juin 1891 liste parmi les bateaux armés pour la pêche du hareng le dundee Henri Rivière, patron Charles Lefebvre, avec 23 hommes d'équipage. Le 7 décembre suivant, pendant une forte tempête, le bateau essaye d'entrer dans le port. N'ayant pu y parvenir, il reprend le large, et le bruit court qu'il est perdu. Le lendemain, il y est amené par un remorqueur de Dieppe. Ce retour ayant été annoncé par dépêche dans la matinée, près d’un millier de spectateurs l’attendent. Aussitôt débarqué, l’équipage se dirige vers la chapelle de la Vierge, accomplir le vœu qu'il avait fait au plus fort de la tempête.

Voici le rapport que le capitaine rédige ensuite pour son armateur et pour les autorités :

« Rapport du patron Lefebvre : Je soussigné, patron du bateau Henri-Rivière, n°1156, armateur Louis Coquais, attaché au port de Fécamp, monté par 23 hommes tous compris, déclare que le 7 décembre dernier me trouvant devant le port de Fécamp à un demi mille au large, par un vent de Nord-Ouest, une forte bourrasque se déchaîna sur nous ; étant cerné par la côte, il me fut impossible de diminuer la voilure, et je dus continuer ma route pour ledit port, malgré que j’aie aperçu le feu rouge qui en interdit l’entrée, car il était trop tard pour virer de bord.

Tout à coup, le capelage du grand mât manqua et toutes les voiles ainsi que le mât tombèrent à la mer ; je fus obligé de couper tout le gréement pour me débarrasser du mât et des voiles qui menaçaient de crever le navire.

Quand cette opération fut terminée, je dus, par mes propres moyens et celui des petites voiles, faire revenir le cap au Nord-Est, et le reflux me soutenant, je dus laisser le navire prendre un peu le large ; quand le flux est venu à renvoyer, j’ai dû mouiller mes ancres et employer une partie de mes halins pour me faire une grande longueur de toilée de chaîne et, malgré cela, je ne cessais de dériver.

A deux heures du matin, la tempête s’étant un peu calmé, le bateau parvint à étaler, et au petit jour, je pus déterminer notre position : nous étions à deux milles au large en face de Saint-Valéry-en-Caux. Nous nous disposions à établir un mât de fortune pour nous rendre dans ce dernier port, quand un remorqueur de Dieppe, le Mercure, nous ayant aperçus, nous remorqua jusque dans notre port d’armement.

Le navire a souffert en démâtant, ce qui fait supposer qu’il doit être visité, car l’eau des pompes se montait plus haut que d’habitude.
En foi de quoi, le présent rapport est sincère et véritable, et je le ferai affirmer par mon équipage si besoin est.

Fécamp, le 8 décembre 1891.
Charles Lefebvre
»

Il n’est pas rare de trouver, dans les familles de marins, des répliques de certains ex-voto, réalisés en plusieurs exemplaires, non seulement pour être déposés à la chapelle des marins mais aussi pour le capitaine ou l’armateur.
Ici, le peintre a accentué dramatique par le dégradé des gris profonds du ciel, et l’écume éclatante des déferlantes qui submergent le navire en perdition. L’inscription sur la toile, qui précise la situation du navire, et sa représentation en difficulté, au moment du vœu, font de ce tableau un ex-voto véritable.
Journal de Fécamp
13 décembre 1891