Éditorial

Créée en 1991, l'Association Fécamp Terre-Neuve a dix ans. Pour symboliser cet anniversaire, ce numéro des Annales du Patrimoine est consacré à des hommes et des femmes, citoyens, marins, armateurs, ou artistes, connus ou inconnus qui, tous, à un moment de leur vie ont vécu ici, à Fécamp.

Dans de précédents numéros, des portraits ont déjà été dressés : Marcel Avenel, chef-mécanicien sur le Spitzberg, Léonce Bennay, charpentier de navires, Arsène Bigot, gentleman sourcier, Guillaume le Conquérant, duc de Normandie, l'abbé Jean de Fécamp, Jacques Daniel Marchery, négociant à Saint-Domingue ou Jean Lorrain et Georges Simenon, écrivains. Nous dédions ces Annales à quelques autres Fécampois et Fécampoises de souche, d'adoption ou occasionnels qui ont marqué l'histoire de la cité.

Certains noms sont connus, mais sans qu'on sache très bien quelle a été leur histoire. D'autres sont ignorés ou oubliés de tous. Le choix n'est pas délibéré, mais découle des recherches des auteurs. Aussi dédions-nous également ces Annales aux nombreux fécampois qui auraient tout autant mérité qu'on leur consacre un article.

Nous les dédions aussi aux bâtisseurs de l'église Saint-Ouen, oratoire millénaire, épargné par la Révolution de 1789, et détruit cet été.

Nous les dédions encore à l'inventeur de la corne à brume, dont le son envoûtant a désormais cessé de résonner dans notre port après avoir guidé vers la terre ferme tant de navires en perdition.

Nous les dédions enfin au capitaine Michel Desjardins, qui nous a quittés il y a quelques mois après avoir publié les émouvants souvenirs de sa vie de mousse sur le dernier voilier terre-neuvier fécampois ; et à tous ceux qui sont aujourd'hui l'âme de la cité - sans penser qu'un jour, peut-être, ils feront l'objet à leur tour, de publications dans les revues historiques du nouveau siècle.

À travers ces quelques portraits, notre but est d'apporter un éclairage nouveau sur ceux qui ont bâti Fécamp, de les faire revivre dans la mémoire collective, et poursuivre ainsi l'écriture de l'histoire de notre ville.

Éditorial

Depuis le temps de la Grande Pêche, celle de la morue, l'archipel de Saint-Pierre et Miquelon a, de ce côté de l'océan, l'allure d'un lieu mythique : celui où les Terre-Neuvas souhaitaient escaler pour se reposer de « l'enfer des bancs », celui qu'ils racontaient à leur retour et dont beaucoup, maintenant, gardent un souvenir ému, empreint de nostalgie, qu'ils font souvent partager à leur entourage.

Durant des siècles, des liens privilégiés se sont noués entre les deux rives de l'Atlantique nord : « faire Terre-Neuve » désignant les campagnes sur les bancs comme les escales à Saint-Jean de Terre-Neuve ou aux îles de Saint-Pierre et Miquelon porteuses d'une histoire indissociable de la pêche à la morue, c'est-à-dire, aussi, d'un métier à jamais disparu. Mais quelle part d'imaginaire véhiculent ceux qui n'en ont qu'une connaissance indirecte fréquemment enjolivée par le regret de nombreux anciens Terre-Neuvas ? Souvent l'image de Saint-Pierre et Miquelon se brouille, indistincte de celles de l'île de Terre-Neuve et des bancs de Terre-Neuve.

Par contre, aujourd'hui, Saint-Pierre-et-Miquelon vit la répétition d'une crise d'une rare amplitude quant aux conditions de son avenir économique - donc de sa raison d'être, avec cette lancinante question : comment vivre dans les îles sans être des assistés ? Et cette interrogation vitale n'est quasiment pas évoquée publiquement en métropole : indifférence, incompréhension, méconnaissance ? Probablement un peu de tout cela à l'égard de ces îles qui ne font pas « la une » de l'actualité, mais qui restent d'une présence prégnante dans la pensée de quelques-uns, tandis qu'elles-mêmes doivent faire un travail de mémoire pour que le passé n'oblitère pas leur avenir.

Par les écrits et documents présentés dans ces Annales, nous voulons contribuer, à notre mesure, à faire connaître l'archipel et la Grande Pêche en proposant un ensemble d'articles qui sont autant de regards croisés et complémentaires mettant en valeur des aspects oubliés ou peu connus - tel le Mémorial terre-neuvien de Beaumont-Hamel, territoire canadien enclavé dans les terres françaises, étrange pendant à Saint-Pierre et Miquelon, îles françaises enclavées dans les eaux territoriales canadiennes.

Éditorial

L’année 1999 fut riche en « ressouvenances ».
Au mois de février, les anciens Terre-Neuvas ont renoué avec la pieuse tradition de la Saint-Pierre des marins. Puis, le dernier navire témoin de la grande époque de la pêche aux doris est revenu au port : l'arrivée attendue de Marité, hôte d'honneur des dernières fêtes de la mer, fut pour tous propice à échafauder les hypothèses les plus folles pour son retour en France, et pourquoi pas à Fécamp...

Notre association se réjouit de ces survivances, qui témoignent du riche passé de la ville. Pour notre part, nous continuons notre travail de mémoire. Plusieurs projets sont en gestation, et nous proposerons bientôt une nouvelle collection de monographies de navires fécampois, dont la première sera justement consacrée à Marité.

Enfin, nous constatons que l'activité éditoriale fécampoise va bien. Dans notre numéro cinq, nous annoncions la prochaine réédition du roman très fécampois de Jean Lorrain, « les Lépillier » ; ce sera chose faite, en fin d'année, par les éditions Du Lérot. Nous saluons aussi la publication récente et très attendue du livre de Jack Daussy « Les drifters harenguiers fécampois ». Comme son prédécesseur « Les Chalutiers morutiers fécampois », publié en 1991, il est l'aboutissement d'un long travail de recherches.

Mais la vie passe et plusieurs amis nous ont quitté. Parmi eux, Robert Soulignac est décédé le 27 mai 1999. En 1995, dans le second volume des Annales du Patrimoine de Fécamp, il signait un article intitulé « la dernière maladie de Guillaume le Conquérant ». Cet article associait les deux compétences qui furent les siennes tout au long de son existence : celle, officielle, du médecin, et celle qu'il pratiquait en amateur passionné et éclairé, d'historien.

Ce texte demeure le seul qu'il ait publié dans notre revue. En 1995, déjà, la maladie de son épouse et la dépression lui avaient ôté une par­tie de son enthousiasme, et nous regrettons que nos Annales soient nées trop tard pour qu'il en devînt le collaborateur régulier.

L'hommage que nous souhaitons lui rendre ici est pour nous l'occasion d'affirmer que, à son exemple, l'histoire n'est pas le secteur réservé de spécialistes, mais qu'elle peut offrir d'immenses champs d'investigation et d'épanouissement aux amateurs, pour peu qu'ils sachent, comme lui-même avait su le faire, travailler dans la complémentarité avec les chercheurs universitaires.
Les Annales du Patrimoine de Fécamp répondent au désir qu'il avait souvent exprimé de voir naître, à Fécamp, une revue historique exi­geante, mais ouverte aux uns comme aux autres.
Cette revue existe maintenant; nous en appelons à tous, historiens professionnels ou amateurs, aussi bien que lecteurs, pour davantage la faire connaître : sa survie en dépend.

Éditorial

Quelques événements ont marqué l'année, les uns tristes les autres encourageants. Anita Conti nous a quittés, en décembre 1997, et Éric Tabarly à son tour est parti, au mois de juin 1998. Mais un nouveau bateau de sauvetage est arrivé à Fécamp, le Cap-Fagnet, ainsi que le Rollon, nouveau bateau pilote, attestant de la persévérance des hommes dans leur relation avec la mer.

Notre association navigue maintenant depuis sept ans. Quand elle fut créée, en 1991, ses fondateurs s'étaient fixés comme objectif de tra­vailler sur la mémoire, pour maintenir vivants les liens entre Fécamp et l'archipel de Terre-Neuve au moyen, entre autres, de publications. Cet objectif a été notre fil conducteur, et le bilan du travail éditorial déjà réalisé nous encourage à le poursuivre.

Cette année a vu l'aboutissement de plusieurs projets : tout d'abord, en juin, la réédition du livre de Marcel Ledun : Ma vie de Terre-Neuva, puis la publication de la première Bibliographie Francophone de la Grande Pêche, enfin, en novembre, la publication très attendue des souvenirs du capitaine de pêche Michel Desjardins : Léopoldine, souvenirs du mousse. D'autres projets sont en gestation et, en 1999, nous envisageons de vous proposer une nouvelle collection : des monographies de voiliers terre-neuviers fécampois.

Outre ce travail éditorial, nous étions présents aux Fêtes de la mer de Fécamp et au Salon du livre maritime de Concarneau, qui a attiré plus de dix mille visiteurs. Nous y avons présenté nos publications et représenté Fécamp. Sur le plan relationnel, la moisson a été riche, nous avons noué des liens dont nous espérons beaucoup, notamment avec le Canada et le grand Salon du livre maritime de Rimousqui.

De plus, l'annonce de l'ouverture prochaine du Musée-Archives de la Collectivité Territoriale de l'Atlantique Nord, à Saint-Pierre, et les liens qu'il a d'ores et déjà noués avec le Musée des Terre-Neuvas de Fécamp, constituent un excellent augure pour les relations entre Fécamp et l'archipel de Terre-Neuve.

Quant aux Annales du Patrimoine de Fécamp, fruit d'un travail collec­tif, cette revue prend désormais sa place dans les événements cultu­rels fécampois. Elle est maintenant attendue et témoigne bien de notre action. En 1996, quand nous nous étions engagés à publier le numéro trois, nous n'étions pas sûrs de pouvoir aller au delà. Aujourd'hui, avec l'aide du Crédit Fécampois, nous vous présentons le numéro cinq. Mais chaque année la publication d'un numéro est un nouveau pari. L'équilibre de cette publication reste fragile, et pourtant nous sommes convaincus que cette aventure mérite d'être poursuivie, c'est ce qui nous motive.

Éditorial

Durant des siècles, des dizaines de milliers de Terre-Neuvas consacrèrent leur vie, et souvent la sacrifièrent, à la pêche à la morue. Il y a quelques années, pour diverses raisons que les intéressés ne maîtrisèrent pas toujours, la grande pêche a pris fin : le Grand Métier n'est plus.

Aujourd'hui, les médias s'emparent de son ombre, profitant du succès annoncé d'un prochain téléfilm que des articles de presse ont déjà rendu célèbre, avant même la diffusion des premières images. Ce fut, à Saint-Malo, une exposition partielle et superficielle. Ce fut également la publication de nombreux recueils d'images anciennes, souvent très décevants.

On ne peut que s'interroger sur les motivations de leurs éditeurs. L'engouement pour les vieux gréements et les chants de marins, la mode d'une pseudo-authenticité, plus factice et imaginaire que réelle, et d'un problématique retour aux sources (mais celles de qui ?), ou le rêve de vie aventureuse par procuration, ne sauraient justifier de telles pratiques. Triste célébration de la découverte officielle de Terre-Neuve, chère aux Anglais, par Jean et Sébastien Cabot, en 1597.

Nous ne voulons pas nous poser en gardiens du temple ; les Terre-Neuvas n'ont besoin de personne pour exprimer ce qu'ils souhaitent. Nous voulons simplement signifier que le respect du lecteur et de l'informateur passe par celui de la vérité historique de la grande pêche, et qu'à ce titre un minimum d'honnêteté et de rigueur scientifique - ne craignons pas le sens des mots - s'impose. Sans prétendre à l'exclusivité, l'Association Fécamp Terre-Neuve poursuivra dans cette perspective avec :

• la publication des souvenirs du capitaine Michel Desjardins,
• une bibliographie francophone sur la grande pêche,
• la réédition du livre de Marcel Ledun Ma vie de Terre-Neuva.

Par ailleurs, une diffusion beaucoup plus large est nécessaire pour que continue la publication des Annales du Patrimoine de Fécamp. Ce numéro n'est sorti, encore une fois, que grâce à l'appui du Crédit Fécampois. Nouveau pari donc sur les Annales, nouveau pari pour l'Association. Nous comptons sur tous ceux qui, comme nous, pensent que Fécamp mérite cette revue et qu'elle doit vivre. Chacun peut nous aider à la faire connaître davantage, à mieux la diffuser et à permettre ainsi que le numéro qui traiterait des Chantiers de construction navale, soit un jour édité.

Éditorial

Créée en 1990, pour la sortie du livre de Léopold Soublin Cent ans de pêche à Terre-Neuve, l'Association Fécamp Terre-Neuve est née pour maintenir vivants les liens entre Fécamp et l'archipel de Terre-Neuve et conserver la mémoire de ce que fut la Grande Pêche : quatre siècles vécus au rythme des campagnes sur les bancs, qui marquèrent profondément l'histoire de la ville.

En 1991, nous avons soutenu le travail de Jack Daussy, qui éditait Les chalutiers morutiers fécampois, puis en 1992, nous avons réédité un livre devenu introuvable, Ma vie de terre-neuva, de Marcel Ledun. Enfin, après un long travail de préparation, en 1995, nous avons publié les souvenirs du capitaine de pêche Emile-Jean Friboulet, Le dernier amiral.

A la fin de la même année, sollicités pour reprendre les Annales du Patrimoine de Fécamp, convaincus de la valeur de l'idée et de la qualité du travail entrepris, nous nous sommes mobilisés pour en poursuivre la parution.

En reprenant Les Annales du Patrimoine, revue porteuse d'une image culturelle forte et d'une "mémoire" précieuse, nous savions qu'au niveau de qualité fixé par ses inventeurs, la voie ne serait pas facile.
Toutefois, nous avons le sentiment que la richesse patrimoniale de Fécamp mérite ce travail. Qu'il s'agisse d'études nouvelles ou de reprises de textes anciens méconnus, tous les travaux que nous présentons participent à l'écriture de l'histoire de la cité. Ils sont autant de témoignages qui doivent être conservés et mis à la disposition de tous pour mieux comprendre ce qu'est la "mémoire" associée au Patrimoine.

Ce nouveau numéro, dont le dossier thématique est consacré à Jean Lorrain, nous l'avons voulu, par son contenu et sa présentation, aussi riche que ses prédécesseurs ; nous y avons investi nos moyens et notre énergie mais, sans l'aide du Crédit Fécampois, il n'aurait pas vu le jour.

Du succès de ce numéro dépendra la suite. La rédaction du prochain numéro, dans lequel nous voudrions traiter des Boucanes, est déjà commencée et nous comptons fortement sur le soutien de chacun, pour nous aider à en maintenir la qualité, espérant que chaque lecteur aura à cœur d'encourager ce travail et d'en permettre la pérennité.